Frustration

Avant de faire les valises pour nous installer ici, je n’avais pas réfléchi une seule seconde à la barrière de la langue. Si je l’avais fait, je ne serais peut-être pas à Atlanta aujourd’hui… Comme on dit, c’est en pratiquant qu’on apprend le mieux. J’en aurais beaucoup à dire sur mon apprentissage de l’anglais et sur l’accent du sud qui me stresse et me frustre de plus en plus. Mais s’il y a bien une chose avec laquelle j’ai du mal, c’est la prononciation des mots français avec l’accent américain. Depuis que nous sommes ici, je découvre une nouvelle prononciation pour des mots que j’ai pourtant répété à l’identique des tonnes de fois, sans jamais me poser de questions. Chaque jour, j’apprends comment prononcer un mot français “à l’américaine”. Ce qui était auparavant un automatisme est devenu quelque chose de réfléchi. Parfois, je me force à répéter le mot en question dans ma tête avant de le dire à haute voix.

Combien de fois, au drive du Starbucks, nous nous sommes retrouvés avec un espresso après avoir demandé une “chocolate croissant” (chocolatine). Je n’ai jamais compris le rapport entre “espresso” et “chocolate croissant”… Alors maintenant, je m’évertue de prononcer quelque chose comme “Kreussante”, en appuyant sur le “a”, avec une fin carrément abrupte. Dur de vous expliquer quand je ne sais pas moi-même prononcer ce mot.

Pour le mot “cliché”, après avoir tenté d’expliquer pendant deux longues minutes à une américaine que le mot que je voulais dire était cliché, ça a fini par ressembler à quelque chose comme “clichéa”. Ne me demandez pas pourquoi ce “a” à la fin. A force d’insister sur le “é”, j’ai, semble-t-il, ajouté un “a”. C’est ce qu’a compris la fille avec qui je parlais.

“Macaron” est le pire je crois. Ici on dit quelque chose comme “macaroune”. Le même son que “room” il me semble. Je m’interroge encore sur le pourquoi du comment du son “ou”…

Baguette et bon appétit me semblent un peu compliqués aussi, alors je les évite. Ce qui est étrange dans tout ça, c’est de prononcer correctement des mots dans ma langue natale et de ne pas être comprise. L’incompréhension se lit sur les visages de mes interlocuteurs. Je dois tenter différentes prononciations qui ne me sont pas du tout naturelles et instinctives. Ca donne parfois des choses drôles, à moitié entre l’anglais et le français !

Mais je suppose que l’inverse est tout aussi vrai et que nous, les francophones, écorchons les mots anglais avec notre accent bien français. En tous cas, pour ma part, c’est certain. Je cherche fréquemment la prononciation des mots sur internet, et l’accentuation (emphasis) me fait bien souvent défaut. Je ne sais pas si les anglophones qui vivent en France, ont, eux aussi, à prononcer des mots anglais à la française pour se faire comprendre. Mais ça me semble logique, surtout pour certains… Ikea (Aïe-qui-est), Cucumber (cuou-queumbeurre), Kanye (K-nié) et le dernier en date que Rémy m’a fait découvrir : Mariah Carey (Meuh-raya quéri). Dans la bouche d’américains, on a vraiment du mal à les comprendre la première fois qu’on les entend.

Sinon, pour le reste des mots français, ça passe encore. Entrée, rendez-vous, voilà, déjà vu, chic, route et joie de vivre ne me frustrent pas. Et même si parfois ça m’agace de m’efforcer de prononcer des mots de manière totalement incorrecte, ça fait toujours chaud au coeur de retrouver quelques mots français au pays des beurrgueurrs.

Julie:
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