Le mois dernier, j’ai fait la plus belle randonnée de ma vie. C’était au Canada, près de Pemberton, en Colombie-Britannique. C’était complètement fou, magique et presque irréel. Le paysage me semblait factice, à l’image d’un décor de cinéma. Je voulais connaître les paysages colorés du Canada, les lacs couleur émeraude et les montagnes aux millions d’arbres à la silhouette élancée. J’ai donc pu entrevoir une infime partie des merveilles dont regorge le Canada avec notre visite au Joffre Lakes Provincial Park.
Ce parc, c’était un peu mon caprice, mais je ne le regrette pas. J’ai dû insister lourdement auprès de Rémy. La veille, coincés au bar du japonais du coin, au milieu des serveurs qui crient par dessus nos épaules, on pèse les pour et les contre. Davantage les contre en fait. Demain, dimanche, est notre dernière journée à Vancouver. J’aimerais voir un paysage digne du Canada, que je ne serai pas prête de revoir ni d’oublier. J’ai repéré un parc dont l’idée est de monter jusqu’aux glaciers en passant par trois lacs couleur turquoise. Seulement, le parc est à 2h45 de route de Vancouver. La randonnée ne fait que 5 km mais en pleine montagne, ça peut facilement prendre 2/3h. Hormis notre backpack et nos paires de baskets, on n’est pas préparé. La présence d’ours plus que probable m’amuse, mais beaucoup moins Rémy. Et l’idée de se lever tôt pour prendre la route nous décourage un peu.
Le lendemain, à 11h, on se décide pourtant à partir. Avant le départ, passage à Walmart pour acheter eau, barres de céréales et kit du parfait petit randonneur. On ne trouve pas de pepper spray, alors sur la route je me renseigne sur la conduite à adopter si on croise un ours… Rester calme (plus facile à dire qu’à faire, mais on s’en serait douté), ne pas lui tourner le dos et surtout éviter de croiser son regard.
A peine quitté Vancouver, le paysage nous laisse sans voix. On prend la Sea-to-sky highway qui longe les montagnes au bord de l’eau. Sur notre gauche, une vue panoramique sur les îles fait notre bonheur pendant une bonne partie de la route.
A 14h45, on arrive au Joffre Lakes Provincial Park. On se change et hop direction le premier lac qui se trouve tout au pied de la montagne. Ce premier lac au pied des montagnes est encerclé d’arbres dont le vert s’accorde à la perfection avec le turquoise de l’eau. Un paysage de carte postale. On reste stupéfait, tout en pensant à ce qui nous attend là-haut. De quoi nous donner du courage pour monter au moins jusqu’au deuxième lac.
C’est parti. Au bout d’un quart d’heure, on ralentit. “Fais des petits pas” me répète Rémy. Puis on prend rapidement le rythme. Le chemin, parfois escarpé et raide, s’engouffre dans la montagne, bordé par des blocs de roches et des arbres tombés en vrac. La boue et les racines forcent notre vigilance. On fait des pauses pour boire mais jamais trop longtemps pour éviter de se faire dévorer par les moustiques.
Les sapins, hauts et imposants, nous enserrent au coeur de la montagne quand le chemin devient plus étroit. Mais avec un peu de hauteur, la vue est à couper le souffle. Les arbres s’écartent pour laisser place à une vue panoramique plutôt inattendue.
Au bout d’une bonne heure, on aperçoit le bleu turquoise du deuxième lac derrière les arbres, on accélère le pas pour se retrouver face à un paysage grandiose.
On reste sans mots les premières secondes avant de se poser au bord de l’eau. Les rayons du soleil se reflètent sur le bleu du lac. On répète en boucle qu’on a bien fait de venir. Seuls au monde, on oublie tout. L’eau d’un bleu éclatant nous donne envie d’y plonger mais elle est glaciale.
Les panneaux indiquent trente minutes pour atteindre le troisième et dernier lac. Il est à peine 17h, on a encore le temps. Le chemin devient plus compliqué. La terre disparaît sous les rochers qu’on doit enjamber. Les escaliers deviennent plus raides, et les sentiers parfois bien cachés.
Une fois tout là-haut, on aperçoit le lac. On escalade les dernières pierres pour atteindre le bord de l’eau.
Une nouvelle claque, une bonne surprise. On aurait presque envie de monter plus haut et de découvrir un quatrième lac, juste pour revivre le même étonnement, la même émotion qu’on ressent quand, après une bonne marche en pleine nature, on tombe sur une folie comme celle-ci. Au pied du glacier, c’est calme et reposant. On est coupé du monde puisque nos téléphones ne passent pas. On se sent isolé, loin de tout. On ne pense à rien et en même temps à tout. On se répète les immanquables clichés, que la nature est belle, qu’on aurait tous besoin d’un bon retour aux sources.
Le bleu du “upper lake” paraît moins intense que le “middle lake” mais la vue sur le glacier Matier est imprenable. J’aurai envie d’y dormir comme le monsieur qu’on a croisé et qui y campait pour la nuit.
Le soleil se couche quand on commence notre descente, tout en musique pour signaler notre présence aux ours. On croise quelques randonneurs avec leur enceinte sur l’épaule. La descente est moins fatigante mais presque plus difficile que la montée. Il faut freiner le rythme pour ne pas tomber.
Une fois en bas, on repasse par le premier lac. Assis sur le banc, face à l’eau et aux montagnes, j’ai du mal à détacher mon regard de cette merveille.
On rebrousse finalement chemin, le sourire aux lèvres mais tout de même contents de retrouver la voiture, les genoux et les chevilles en vrac.